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Les rosés d'automne - Le temps médité

" [...] DOMAINE DE TERREBRUNE


Ici rien ne distrait le grand chant de la terre et les rosés s'en font les interprètes fidèles, à l'énergie intacte et palpitante. Des pétales de rose ancienne caressés par le vent nourri d'embruns salés.


Au-delà de la copropriété du domaine de Terrebrune, là-bas à Ollioules derrière le bijou du port de Sanary, sur les aires de Bandol, le bien commun qui réunit Reynald Delille et Jean d'Arthuys c'est la beauté. Avec ce viatique qui soutient la vie, ils font route ensemble sur ces lieux grandioses dominés par la figure du grand titan, le massif du Gros-Cerveau, et ses éboulis miraculeux où sont installées, comme au spectacle, les vignes du domaine. Elles voient la mer de leurs terrasses théâtrales, après la dégringolade des toits de vieilles tuiles de Sanary, avec leurs apex balancés elles font des signes à l'île du Grand Rouveau, celle des Embiez, celles du Gaou. Sur l'extrême du Trias, les affleurements de fond marin d'il y a 220 millions d'années, les parcelles de mourvèdre dédiées au vin rosé sont des sols à engobe, plus clairs que les rouges sombres qui ont donné leur nom à Terrebrune. Là-dessus donc on a surtout des mourvèdres - qui, au passage, ont les qualités  pour entrer dans le vin rouge -, et puis des grenaches et des cinsaults, plutôt des jeunes vignes entourées de la féconde biodiversité : les bois, les oliviers, les yeuses et le chatoyant enherbement naturel de mille fleurs enrichi.

L'agriculture biologique et biodynamique est là, les labours à cheval, la main à la pioche, des gestes d'effort et d'attention sensibles et rigoureux pour qu'adviennent les grands raisins de parfait équilibre nourris de la minéralité, du milieu mycorhizien qui font les grands rosés du domaine et traversent le temps, le pas sûr et l'humeur légère : « C'est probablement que, comparés aux vins rouges, les rosés ont moins besoin d'oxygène, moins besoin de tanins. Ils ont la minéralité, la sucrosité, l'enveloppe et la fraîcheur d'un pur jus de fruit et pourtant dans ces années difficiles on oscille autour de 25 hectos-hectare avec des fruits concentrés à petits grains. » La longévité des rosés de Terrebrune fut découverte grâce à un coup de fil affolé d'un client restaurateur en 1982, on était au début de la saison. « Je me suis oublié les 1977, ils vont être imbuvables ! Qu 'est-ce que je fais de ça ? » Obligeant, le domaine changea les vieux pour le millésime en cours. On s'empressa de goûter les oubliés, ils étaient magnifiques: « Les qualités d'un grand blanc, on venait de découvrir le potentiel de garde de nos rosés, depuis on les garde. Tiens, les voilà, goûte ! »

Finesse, longueur, saveur, le triptyque fondamental, exotisme et charme du 2024, bercé d'épices orientales et d'amers salins, un joli paon fait sa roue dans le palais pour accompagner les petits rougets de roche. 2023 est marqué par l'année du label Biodyvin, tout de suite l'éblouissante fraîcheur, les sensations d'agrumes et puis des notes douces et délicates de gelée de coing, une complexité aromatique ardente qui l'inscrit déjà dans un temps long. En magnum, le 2022, le cher mourvèdre en patron, ambassadeur du tracé minéral de son origine, l'âme des lieux débarrassée des atours de la prime jeunesse, les pétales de rose ancienne posés sur la plage au souffle léger du vent nourri d'embruns salés. En magnum toujours, voici 2017, le sel du Trias sculpte l'ondulante silhouette qui s'avance, la démarche souple d'un félin, le regard profond et droit. « Le terroir nourrit le vin dans le temps », les amers sont là, les fruits exotiques, la mangue fraîche et cette énergie intacte, palpitante, après huit ans dans le secret de la cave creusée contre le mur du Trias. Le luxe et la rareté d'un objet de haute culture provençale au cœur d'une ruche aux alvéoles orangées, les fleurs d'acacia au souffle miellé au printemps, la belle finale saline.

Un vin comme ce 1994, cette fois-ci en bouteille, on y entre pour un voyage sensuel, il emmène l'amateur dans son monde, faut y aller avec son désir franc et droit, il n'impose rien, il fait juste entendre sa mélopée où chante la flûte enchantée du grand Pan, un chant libre et heureux qui monte du cœur palpitant de la terre, se glisse dans la forêt, la garrigue, s'empreint de leur esprit sauvage. On saute dans un ailleurs plus loin, l'écriture des pleins et déliés des collines, rien de rutilant, la simplicité d'un haïku lumineux, une musique douce et subtile, discrète et profonde, tracée sur la portée du temps à l'infini, rien ne distrait le grand chant de la terre, c'est l'essence, l'élixir des jours de joie. / JEAN-LUC BARDE


Domaine de Terrebrune Rosé 2017 - BANDOL

«C’est un vin profond, en mouvement subtil et d’un toucher caressant. La fraise

fraîche et mûre est portée par la tension minérale, reflet de son terroir et de son

millésime. C’est une essence nourrie de son biotope riche et foisonnant. Même dans une année extrême, il concentre la finesse soulignée par la qualité des amers.» "


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